Centenaire du parcours : nous sommes les héritiers d’un patrimoine exceptionnel
Interview de Philippe Delaune, président du golf de Saint-Germain de 2000 à 2008, qui retrace l’histoire de notre parcours.
« Cette année, nous célébrons le centenaire du parcours de Saint-Germain tel que nous le connaissons, réalisé par Harry Colt en 1922. Colt fut avec Simpson, l’un des grands architectes du premier quart du XXè siècle [1]. Il fut un précurseur, avec une philosophie très attachante basée sur le plaisir du jeu. Il a écrit plusieurs ouvrages expliquant ses principes directeurs.
Colt a conçu le tracé de Saint-Germain comme un « Inland links » c’est-à-dire un links d’intérieur, très peu boisé. Or, au fil des décennies et des effets de modes, la configuration du parcours a beaucoup changé. La plantation d’arbres avait été favorisée pour un rendu plus esthétique, pour isoler de la forêt et durcir le jeu. Et puis on arrosait beaucoup dans les années 80 pour que l’herbe soit très verte. Il y avait par ailleurs de grandes haies en « L » entre les départs, de 2,5 mètres de haut et 1,5mètre d’épaisseur, pour isoler les départs. Visuellement, les perspectives furent progressivement bouchées par ces ajouts (au départ 8 par exemple on ne voyait plus le club house).
Photo de 1923 du parcours de 18 trous
Au fil du temps, la pousse des sapins a eu des répercutions en termes de qualité de l’herbe[2], leurs racines ont empêché la pousse de l’herbe, l’air ne circulait plus sur les départs et sur certains greens et ces massifs favorisaient les nappes de brouillard en hiver. Des greens ont dépéri (humidité, champignons, bactéries), des plaques d’herbe partaient par bloc. A partir des années 90 on a introduit la pratique du vertidrain et réduit l’arrosage pour que l’herbe puisse se renforcer et retrouver des racines. Or la question de la restauration du tracé restait ouverte.
En 2000, le comité est donc allé chercher des compétences en Angleterre, pour faire un audit du terrain et avoir des axes de travail clairs, permettant de revenir progressivement à l’esprit initial de cet « Inland links ». Notre greenkeeper adjoint de l’époque, Stuart Hallett, est parti à Edimbourg suivre un cursus d’architecte de golf, et a fait son mémoire de fin d’étude sur la restauration du 16 de St Germain, jusqu’à devenir aujourd’hui l’expert anglo-français des parcours Colt. Ce travail de fond a ouvert les échanges internationaux avec d’autres parcours Colt (notamment le club de Rye en Angleterre).
Nous avons compris que le parcours avait été dessiné initialement autour d’une ligne de gros chênes et, qu’avec le temps, d’autres arbres ayant poussé, il avait perdu jusqu’à une dizaine de mètres sur chaque côté du fairway. Il a donc été décidé d’alléger les haies, les massifs, d’aérer le parcours, de rouvrir les perspectives, d’ajouter ou de supprimer des bunkers (notamment au 17), pour redonner de la cohérence[3].
Le parcours a été magnifié par ces opérations, il a retrouvé une forme de cohérence, d’harmonie ; des livres américains sur les grands parcours le citent comme une référence. »
=>> Pour en savoir plus :
[1] Henry Colt était un architecte anglais, il est intervenu sur une soixantaine de parcours principalement en Angleterre, en Irlande (ex : Royal Portrush), en Belgique, Hollande et au Canada. En France il est notamment l’architecte des parcours de Granville, Le Touquet et Saint-Cloud.
[2] Au 4 par exemple, derrière le bunker de gauche, ou à droite du fairway du 16, il y avait des massifs d’une douzaine de mètres d’épaisseur de nombreux sapins Douglas. La pousse lente et insidieuse avait gagné presque la moitié de la largeur du 16. Entre le green du 9 et le 10, un rideau d’arbres bouchait la lumière.
[3] Les sols des greens ont également été inspectés à cette occasion pour voir s’ils n’avaient pas été modifiés au gré des tontes et nous avons eu la confirmation qu’ils étaient historiquement comme cela, alors que Colt dessinait plutôt des greens de petite taille.
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En 2022, le parcours est bichonné par l’équipe terrain du golf que voici, ainsi que la commission du terrain et de l’environnement, en partie en photo.